mercredi 5 septembre 2012

I want to ride my bycicle : une approche marketing du fixie (part1)

La sortie aujourd'hui du film Premium Rush est l'occasion de mener une réflexion marketing sur le fixie. Pour ceux qui l'ignorent, le fixie est un vélo dont le pignon fixe (fixed gear) entraine solidairement la roue arrière, le pédalier et les jambes. Lorsque le mouvement est impulsé, le cycliste fait corps avec la machine qu'il freine par rétro-pédalage ou par dérapage contrôlé et anticipé (skid). 

Bande annonce de Premium Rush


Ce qui est intéressant dans la cas du fixie c'est que le voit se constituer une culture (appelez là, culture urbaine, pop culture, sous-culture, culture underground...). Cela dit, j'accuse quelques lacunes en sociologie des pratiques culturelles aussi je préfère aborder la question par le prisme d'une "phénoménologie marketing". Par "phénoménologie", je ne me risque pas à une lecture philosophique du pignon fixe mais plus simplement à une description du phénomène. Autrement dit, comment la diffusion de la culture fixie se donne t-elle à voir?
Je voudrais mettre en relief un modèle finalement assez classique, celui qui va From the Margin to the Mainstream ou d'un marché de niche constitué d'experts et d'early adopters à un marché de masse. Ici, nous pouvons faire l'hypothèse que la sortie de Premium Rush, film manifestement calibré pour le grand public, est un symptôme de la diffusion d'une sous-culture au delà du cercle d'initiés.

Qu'est ce que le pignon fixe? 

Je favorise la lecture marketing car ici, l'innovation est fondée sur une régression technologique : on abandonne la roue libre. Cela produit deux effets :
  • le vélo est dépouillé du superflus : plus de dérailleur avant/arrière, plus de frein pour ceux qui roulent en breakless. Le fixie exalte l'essence du vélo, la pureté des lignes d'un cadre mais aussi l'ensemble des autres composants. La démarche est esthétique. Il s'agit de faire du beau en préférant certaines marques (une selle brooks, un cintre et une potence Cinelli, des roues Mavic, Easton ou Aerospoke, un pédalier Campagnolo...). 
  • de nouveaux usages urbains : on le voit dans le film Premium Rush, le fixie est un vélo léger, maniable, réactif et véloce. Il a été adopté par la communauté des messagers. Mais la beauté fondamentale du fixie, son équilibre, ses couleurs, sa ligne, en fait aussi un objet très prisés des jeunes urbains, graphistes et designers. Plus largement se constituent des communautés (des tribus aurait-on dit il y a 10 ans) qui déclinent le vélo urbain sur plusieurs usages (le fixie, la bike-polo...)
Du Porn Bike (source, pignonfixe.com)

Il faut alors comprendre qu'ici, l'innovation est socio-culturelle : elle ne repose pas sur des améliorations technologiques du vélo (au contraire) ni même sur une une innovation commerciale des marques de vélos. Dans ce cas (comme dans beaucoup d'autres concernant les cultures urbaines), on doit ici l'émergence du fixie à des précurseurs californiens accordant autant d'attention à la dimension lifestyle qu'à la pratique. Finalement, le fixie a plus à voir avec le skate qu'avec les pistards.

Pour intégrer les fondements culturels du vélo à pignon fixe, il est indispensable de regarder le documentaire "le vélo de papy fait de la résistance" (la page Facebook)



Le magazine d'Arte Tracks a aussi consacré un reportage au fixie :

Pour aller plus loin encore, vous pouvez vous balader sur le forum pignonfixe.com, sur le blog surface (des gars de NYC qui racontent leurs sorties en fixie), voir qu'il existait un magazine Fixé, et enfin lire l'excellent billet de Philippe Gargov "Premium Rush : Hollywood à vélo, dépassées les autos ?"

Dans un prochain billet, en nous appuyant sur le cycle d'adoption de l'innovation, nous identifierons des symptômes de la diffusion de la culture fixie.

Bonus : quelques photos prises lors de mon passage à San-Fancisco

Une conversion Peugeot
Une boutique vend des fringues vélo vintage
Bianchi
Rat Bike vernis

2 commentaires:

  1. Bonne contribution sur le fixie. J'apporterais une limite à l'analyse. Après avoir observé les vélos de ce genre à Londres, j'ai remarqué que la majorité avait une roue libre. Il ne s'agirait donc pas de fixies à proprement parlé. Si on considère le vélo comme un moyen de locomotion comme le fond beaucoup de londoniens. J'ai du mal à comprendre l’intérêt d'abandonner la roue libre. Je pense que la tendance est plutôt d'avoir un vélo au design unique, facile d'entretien, et qui ne déraille pas. Cela irait dans le sens d'une conduite ecofriendly et de personnalisation de son vélo. Le parallèle avec les petites voiture personnalisé type citroën DS ou Fiat 500 me semble plus proche de la réalité. Qu'en pensez vous?

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  2. Votre remarque est pertinente, je travaille justement sur la seconde partie de l'analyse où je montre qu'il existe aussi un phénomène de renoncement au pignon fixe pour la roue libre (ou moyeu flip flop)

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